Pouvez-vous nous résumer en quelques mots l’intrigue de votre livre, et les sujets que vous avez voulu traiter ?
Le roman raconte la quête initiatique d’une jeune femme étudiante qui quitte Paris pour la province après un échec amoureux. En trouvant un job dans un cinéma, elle va s’initier à des plaisirs insoupçonnés et interdits. Un Nouveau Monde va s’ouvrir à elle.
Sans dévoiler trop l’intrigue, disons que la sexualité buccale (dans un premier temps) va devenir une obsession pour elle, et la rencontre avec une bite en particulier, qui va la rendre totalement accro.
J’ai voulu faire éprouver au lecteur le plaisir de la découverte d’une nouvelle sexualité avec des situations uniques et entièrement dévolues au lieu magique qu’est un cinéma.
La Nouvelle caissière du cinéma est votre premier roman érotique. Pouvez-vous nous parler de votre parcours d’auteur et nous expliquer d’où vient votre désir de vous frotter à un tel « mauvais genre » ?
J’écris depuis vingt ans environ, j’ai flirté avec l’écriture de scénario puis je me suis orienté vers les livres jeunesse ! Je ne vais pas vous mentir, j’ai toujours été obsédé par les femmes et leur beauté, par leur mystère et la fascination qu’elles exercent sur nous. Lorsque j’écris des albums pour enfant, on est assez limité dans notre champ d’action, on doit rentrer dans des cases thématiques chères aux éditeurs et aux parents. C’est assez lassant, les romans m’ont ouvert un nouveau champ d’action, et aussi plus de travail du point de vue littéraire, mais j’avais encore l’impression que quelque chose au fond de moi n’était pas exploité et que ça devait sortir.
Vous allez peut-être avoir du mal à le croire, mais je n’avais jamais lu de roman porno il y a encore deux ans, je me souviens avoir lu Emmanuelle, enfant, en cachette, sous les draps du lit avec une lampe de poche.
Et un jour, pas si lointain, j’ai trouvé un livre de Media1000 en plein milieu d’un couloir désert d’un cinéma, était-il tombé d’une poche ou avait-il été abandonné volontairement par son propriétaire ? Était-il en train de m’observer lorsque je l’ai ramassé et que mes yeux se sont écarquillés en découvrant la belle femme noire dénudée sur la couverture. Je l’embarque avec moi et l’ouvre le soir même. Après quelques chapitres, je me découvre très excité par sa lecture. Une fois le livre fini, je me suis dit que je voulais en lire d’autres et surtout l’idée d’en écrire un deviendrait omniprésente dans les semaines suivantes.
Plus tard, en à peine quelques heures, j’avais posé les bases de mon histoire : le lieu, le personnage principal et quelques situations coquines que je souhaitais développer.
Ensuite, j’ai cherché quels étaient les meilleurs auteurs du genre, bien sûr, ça passait par les éditions Musardine, j’ai découvert Esparbec avec La Pharmacienne, quel choc ! Je me suis dit voilà un genre littéraire où tout est permis, mettre sur le papier tous ses fantasmes ou raconter ses propres expériences, quel pied !
Ensuite, j’ai lu d’autres Esparbec et tout Christophe Siébert. Chaque matin et soir, bander en lisant un livre était assez nouveau finalement. Ça m’a encouragé à vouloir procurer les mêmes sources de plaisir à mes futurs lecteurs.
Parlez-nous de votre quotidien d’auteur ? Avez-vous, des rituels d’écriture ? Combien de temps mettez-vous à écrire un livre ?
Oui, installer un rituel me semble obligatoire, sinon je m’éparpillerai vers des activités plus légères et plus faciles ! Donc en principe ça donne : levée, petit-déjeuner, lecture, visionnage d’un épisode de série (ou d’un documentaire ou d’une moitié de film) (j’essaye de supprimer cette étape ces derniers jours), ouverture du PC avec un peu de mails, de réseaux sociaux, puis reprise de l’écriture en relisant les dernières phrases ou en feuilletant le cahier d’idées regroupant aussi la liste des séquences. C’est à peu près pareil l’après-midi. Je n’écris pas le soir que je consacre à ma passion pour le cinéma ni la nuit que je consacre à mon autre passion.
Une fois le premier jet terminé, je relis chaque chapitre, retravaille les phrases en choisissant les bons mots, coupant ou ajustant. À cette étape, je ne préoccupe pas trop de l’orthographe même si j’en corrige quelques-unes. Ensuite, je m’attelle aux corrections pures et dures et généralement je modifie encore les phrases bancales. Ensuite, il y a encore de nombreuses lectures et modifications. J’ai écrit La nouvelle caissière du cinéma en deux périodes de trois mois entrecoupé de longs mois d’arrêt. La reprise a été dure donc plus jamais d’aussi longue coupure.
Bien sûr, comme je poursuis ma carrière d’auteur jeunesse, ce n’est pas toujours facile de passer de l’un à l’autre !
Ce mélange entre humour (parfois potache) et pornographie pure et dure donne à votre livre tout son sel et toute son originalité. Est-ce un choix dès le départ, ou bien cette atmosphère s’est-elle imposée au fur et à mesure de l’écriture ?
Non, comme il s’agit de mon premier roman, j’imagine qu’il y a des défauts et quelques errements, mais je pense que la lecture fonctionne bien ainsi, rien de volontaire, en tout cas au départ, mais j’imagine souvent des situations de gags (mon cerveau en roue libre fonctionne ainsi), alors de temps en temps, c’est plus fort que moi. Mais je voulais avant tout un livre excitant avec une histoire intéressante, avec une pointe de mystère et de légèreté, pas juste une succession de scènes torrides.
Puisque vous êtes cinéphile, quels sont vos films pornos ou érotiques préférés ?
J’adore le porno, mais je ne regarde plus de longs métrages, d’ailleurs j’ai l’impression que ça n’existe presque plus. Le porno a beaucoup évolué avec internet, mais vous le savez déjà. J’ai vu récemment Derrière la porte verte, il y a de scènes intéressantes et notamment la dernière séquence et les jets de sperme au ralenti quasi psychédélique. Il y a eu bien sûr quelques actrices de ma génération qui m’ont marqué : Marylin Chambers, Tabatha Cash, Ovidie, Katsuni, Clara Morgane, Nikita Bellucci. Ensuite, j’ai eu une petite addiction aux productions allemandes John Thomson avec les séries GGG, troublantes les premières fois. Dernièrement, j’ai découvert les Cam girls monnayées par les internautes, bien sûr ça m’a donné une idée d’histoire dorénavant inscrite sur un petit carnet. Je repense souvent à cette jolie Française qui dit travailler dans une administration (la CAF, je crois) qui passe ses journées de repos en train de se branler et se goder dans sa voiture, le tout filmer par son smartphone, avec des gens qui passent non loin, et parfois, elle file en forêt pour la même activité. Fascinant !
Quels sont vos thèmes préférés en pornographie ? Pour La Nouvelle Caissière du cinéma, vous êtes-vous imposé des limites ?
J’ai envie d’explorer un maximum de thèmes, certains risquent de devenir récurrents, c’est sûr, mais comme c’est mon premier, c’est encore un peu tôt pour en parler, et je l’ignore sans doute, moi-même. Je peux quand même préciser que l’amour à plusieurs, la bisexualité, le sexe en extérieur, le voyeurisme, les jeux de sperme, les sex-toys, la découverte de pratiques sexuelles inconnues me plaisent. Sans oublier l’amour avec un grand A, il est fort probable que je sois un obsédé romantique.
Pour la nouvelle caissière du cinéma, le but était d’utiliser l’élément central du décor : le cinéma qui est une entité à part, un exutoire à fantasmes, c’est quasiment un personnage en soi, d’ailleurs parfois équipé d’atouts masculins ! Faire l’amour au cinéma est un fantasme classique que certains assouvissent, mais avec ce roman, on embraye la sixième vitesse et on déclenche le turbo, le film n’est plus sur l’écran, mais dans la salle (et pas que).
Qu’est-ce qu’une scène de cul réussie selon vous ? Quels sont vos méthodes, vos ingrédients secrets, vos « petits trucs » ?
Elle doit être réaliste et le plus crédible possible. C’est pour ça que j’ai toujours eu du mal avec les manga de cul, l’écolière en uniforme qui se fait prendre par tous les trous par un extra-terrestre aux bras tentaculaires, c’est sympa, mais pas très excitant, car trop éloigné de notre réalité. Après si demain, ça m’arrive, je changerai peut-être d’avis !
Avant d’écrire, je visualise la scène en images. Il y a trois personnages qui ne se connaissent pas, bloqués dans un ascenseur, qu’est-ce qui peut se passer ? J’imagine plusieurs possibilités, mais généralement la plus excitante surgie assez vite, ensuite, je n’ai plus qu’à décrire ce que je vois. Je pense qu’il faut être sincère, si ça excite l’auteur, il y a de fortes chances que ça fasse le même effet sur une bonne partie des lecteurs. Le plus dur, je pense, c’est de ne pas lasser le lecteur avec une succession de scènes de cul, ou alors, et ce n’est déjà pas si mal, il se contente de lire d’une main un chapitre chaque soir et devrait tout de même passer une nuit agréable.
Pour La nouvelle caissière, j’ai voulu écrire un livre léger, amusant, mais avant tout très excitant.
Dans un roman érotique, qu’est-ce qui est le plus difficile à écrire ?
Je dirais, pour l’instant, les scènes avant l’acte, montrer les jeux de regard, le désir qui se déclenche chez les protagonistes, et faire « monter » le lecteur avec eux. Mais il faut aussi que les scènes de cul ne soient pas comme une pièce rapportée, qu’on se dise que telle scène pourrait aller dans n’importe quelle situation et n’importe quel roman, et ça n’est pas si simple, par contre si l’acte est en osmose avec le contexte alors, c’est gagné.
Et comme pour tout roman, la principale difficulté est d’imaginer une intrigue qui tienne le lecteur en haleine, mais nous, on doit en plus, le tenir excité, en fait, on a plus de mérite qu’un auteur classique !
Faites-vous lire vos manuscrits à des lecteurs (ou des lectrices) privilégiés, avant de les envoyer à vos éditeurs ?
Pas trop, à chaque fois, je pars dans l’inconnu, je suis à la fois l’auteur et mon propre lecteur, et donc pas facile d’avoir du recul. Pour La nouvelle caissière, oui, j’ai eu une lectrice privilégiée et j’ai même fait preuve d’impatience puisque je lui ai donné les chapitres au fur et à mesure, ce que je ne referais sans doute pas.
Si je vous disais que c’est ma mère, vous ne me croiriez pas ? Eh bien, vous avez raison, car ce n’est pas elle (je me contente des textes jeunesse). C’est une dame, très proche, dont le rôle initial était surtout la correction orthographique, mais j’ai testé aussi l’effet du texte sur elle, je lui ai demandé de le lire une première fois sans le corriger. Eh bien, hormis quelques passages, j’ai cru comprendre qu’elle avait passé d’agréables moments après avoir déposé mes feuilles A4 agrafées sur sa table de nuit.
Et c’est tout, c’est pourquoi, j’ai hâte que les lecteurs déposent leurs avis sur le site de meshistoiresporno.com et de lamusardine.com ou ailleurs, j’ai d’ailleurs ouvert un site officiel (juliandanbecq.wixsite.com/porno) et une page Instagram (instagram.com/juliandanbecq), donc n’hésitez pas.
Quels sont vos futurs projets ?
Je termine le deuxième roman pour La Musardine. J’espère qu’il plaira. Il est différent, plus sombre et réaliste et nous amènera de Paris jusqu’à Tahiti, et je vous garantis qu’il n’y aura pas que la température extérieure qui sera chaude.
Ensuite, j’ai déjà un carnet d’idées bien rempli. Le troisième roman commence à prendre forme dans mon esprit, la thématique est choisie, je me lancerai dans l’intrigue après la fin de l’écriture du deuxième et quelques projets en jeunesse à reprendre.