L’OPJ Jacques Rivette poussa un soupir et se laissa aller en arrière sur son siège. Comme souvent il était au-delà de la fatigue. Cela faisait… Il préférait ne pas compter le nombre d’heures qu’il venait de passer au commissariat sans dormir. Par chance, il avait divorcé. Et ses enfants, grands maintenant, travaillaient. Il n’avait plus personne à la maison pour l’attendre. Il n’aspirait plus à présent qu’à quelques heures de sommeil, même s’il savait que, paradoxalement, lorsqu’il se laisserait enfin aller sur une couche, il serait sans doute encore trop tendu pour s’endormir immédiatement. Il vivait sur les nerfs depuis des années, comme ses collègues. Un métier difficile, mais que cependant il aimait.
Il n’avait pas entendu la porte s’ouvrir, par contre il sentit une présence. Il ouvrit les yeux, et vit devant lui un policier en uniforme.
— Pardon de te déranger, mais on a un client un peu spécial en bas. Ou plutôt une cliente. Il faudrait que tu la reçoives pour savoir si on la met en garde à vue ou pas. J’ai là le rapport du policier en patrouille qui l’a arrêtée. Elle était avec un homme, mais il s’est enfui et on n’a pas pu le rattraper.
— Très bien, amène-là, encouragea Rivette, tout en attrapant les notes rédigées à la hâte.
Cela faisait plus de vingt ans maintenant qu’il travaillait dans la police. Il l’avait découvert au fil des années, tout était possible. Surtout le pire bien sûr, sans quoi ils n’auraient pas été là. Mais il y avait souvent, dans la folie du monde, dans le flux des événements qui chaque jour secouaient la planète, du cocasse. Le genre de situation dont le comique constitue une pause bienvenue au milieu d’une horreur qui elle, bien souvent, ne prête pas à rire.
La situation décrite valait son pesant d’or, et il n’eut aucun mal à visualiser la scène.
Ce que par contre, il n’avait absolument pas visualisé, c’était la beauté de la jeune femme qui pénétra dans le bureau quelques secondes plus tard, menottée, suivie par l’homme en tenue.
Malgré sa fatigue, et sans doute parce qu’il n’avait pas eu de femme dans ses bras depuis pas mal de temps, il sentit le désir courir dans ses veines, le brûler, et son sexe se durcir.
— Je pense que tu peux lui enlever les menottes, suggéra-t-il à son subordonné, qui lui obéit.
Les quelques secondes pendant lesquelles le policier s’exécuta lui donnèrent le temps d’examiner la jeune femme, dont le sourire narquois et le regard disaient clairement qu’elle prenait la situation avec pas mal d’ironie.
Elle devait avoir 25 ans tout au plus. Elle était vraiment magnifique.
Elle avait les yeux les plus troublants qu’il avait jamais vus, d’une couleur rare, une nuance de bleu pâle. Ils se collaient à vous et semblaient vous fouiller.
Elle était juchée sur des chaussures lacées haut, en cuir, avec des talons aiguilles d’une bonne dizaine de centimètres, et gainée par une combinaison en latex. C’était la première fois qu’il en voyait une dans la vie réelle. Pour lui, c’était réservé aux films pornos qui occupaient ses soirées… Une chose était sûre, ça la mettait en valeur, et ce n’était pas ça qui allait réduire son érection, au contraire. Très grande, elle avait un corps marqué par des courbes pleines, sans doute quelques kilos en trop, mais ça lui allait particulièrement bien. Le regard du policier se posa aux endroits stratégiques et eut du mal à en décoller. Il s’en voulut parce que la blonde devait le sentir sur elle, comme une chaleur. Elle avait une poitrine pleine, qui tendait le latex, on pouvait en dire autant de ses hanches, de ses cuisses. Son cul, il s’en aperçut un instant quand elle se retourna pour regarder à l’extérieur par la minuscule fenêtre, était en harmonie avec ses seins, une croupe pleine, haute. Le sillon était bien marqué par le latex, tout comme devant, sur le mont de Vénus proéminent. Il se rendit compte que la tenue bénéficiait d’une longue fermeture éclair qui démarrait haut sur le pubis, descendait à l’assaut du mont de Vénus, mais ne s’arrêtait pas là, continuant entre les cuisses pour venir poursuivre son tracé jusqu’au haut des fesses. L’espace d’un instant il se vit de manière nette tirant sur la fermeture pour mettre son ventre à nu et enfoncer sans complexe son membre dur en elle. Curieusement il ne ressentit aucune honte.
L’homme en tenue s’éclipsa, les laissant seuls. La jeune femme resta debout, semblant lointaine.
— Vous pouvez vous asseoir.
Elle obéit. Il le regretta aussitôt parce que cela lui masquait en partie son corps, et qu’il aurait voulu pouvoir continuer à l’observer. Mais après tout, il n’était pas là pour ça. Le sens du devoir reprit le dessus.
— Très bien mademoiselle. Je vais être clair. Nous sommes ici ce soir dans le cadre d’un entretien préliminaire pour savoir si nous devons vous placer en garde à vue. Vous ne l’êtes pas pour l’instant. J’ai ici votre carte d’identité. Vous me confirmez bien que vous vous appelez Nathalie F… et vous résidez ici dans la ville, quartier des Eucalyptus?
— C’est bien moi, et je réside bien à cette adresse.
L’espace d’un instant, Rivette se dit qu’il irait volontiers lui rendre visite, et lui enlever sa tenue. Recevait-elle des hommes chez elle ? Pas forcément, puisqu’on l’avait trouvée dans la rue.
— Ça vous dérange si je me mets un peu à l’aise? Ces tenues sont sexy, mais elles tiennent chaud.
Il regretta immédiatement son « pas du tout », car elle tira sur le zip qui montait jusqu’à son cou juste en dessous de ses seins, dévoilant une grande partie de chair, et une bonne moitié de ceux-ci. Elle ne portait visiblement rien dessous. Cela aurait-il d’ailleurs été possible, vu l’étroitesse de la combinaison? Un instant, il imagina les seins jaillissant. Le lycra donnait clairement à voir leur forme, leur volume, leur lourdeur… Il aurait fallu qu’elle descende un peu plus la fermeture éclair et c’était bon. Il pensa à cet instant que chacun de ses gestes était maîtrisé, et qu’elle était totalement en contrôle. L’espace d’un instant, ce fut très bref, mais cela lui déplut, et il s’efforça de chasser cette sensation, il eut le sentiment qu’elle était bien plus forte que lui, et qu’elle allait prendre le dessus sans qu’il arrive à reprendre la main. Puis il chassa cette pensée. C’était lui le plus fort. Cela faisait des années qu’il exerçait ce métier.
— Je vous lis les grandes lignes du rapport. Nous étions en patrouille, mon collègue et moi. Nous avons reçu un appel nous signalant un appel d’un VTC, au bois de M… Comme nous étions tout proches nous nous y sommes rendus. L’homme nous attendait. Il semblait perplexe et perturbé.
— Vous voulez les voir ?
Le policier releva les yeux, et fixa la femme.
— Voir quoi?
— Mes seins? Je sens bien qu’ils vous plaisent.
-Vous savez que vous vous adressez à un officier de police judiciaire?
Elle sourit.
— Je côtoie tous les jours des hommes puissants. Par exemple, apprenez que deux fois par semaine, un sénateur me rend visite et me demande de lui faire pipi dessus. Il n’y a que cela qui lui procure de la jouissance. Je ne me laisse plus impressionner par personne.
L’OPJ, troublé malgré lui, continua sa lecture.
— Il nous a confié avoir vu une jeune femme vêtue d’une combinaison de latex promener un homme nu en laisse. Cet homme était à quatre pattes, et il avait une boule rouge dans la bouche.
— C’était moi, je ne chercherai nullement à le nier.
— Nous avons avancé dans les bois, et nous avons trouvé la jeune femme. L’homme avait disparu. Nous avons décidé de l’amener au commissariat pour plus ample interrogatoire.
— Vous voulez plus de détails ? Nous vous avons vu arriver. La voiture de mon client était garée un peu plus loin. Nous prévoyions que ce genre de problème surgisse… Il a rejoint la voiture, s’est enveloppé d’un imper et a disparu. Il souhaitait que je le promène en laisse dans ce lieu qu’il aime, mais il avait prévu une sortie de secours. Il est peut-être tordu, mais pas stupide.
Elle descendit le zip un peu plus, plongea les deux mains dans l’ouverture, et en fit jaillir ses seins, tenant ses mains dessous, en coupe. Ils étaient exactement comme il les avait supposés. Il est vrai que le latex laissait peu de place à l’imagination. Lourds, charnus mais fermes, avec des aréoles larges et des tétons, qui sous l’effet de la température se mirent à durcir et s’allonger… Il aimait particulièrement les filles comme elle, avec un corps charnu, tout en courbes. Pourquoi le nier ? Il aurait aimé étendre la main et venir toucher la chair, qu’il imaginait élastique et chaude. Cela faisait un certain temps qu’il n’avait pas caressé une femme, et elle aurait été une belle compensation pour ces mois de frustrations. Pourtant, elle ne se laissa admirer que quelques secondes avant de remonter la fermeture-éclair. Ce fut sans doute plus efficace que si elle s’était laissée admirer plus longtemps, et la beauté de sa poitrine demeura devant son regard, comme une icône disparue.
— Je pense que vous pouvez comprendre que ce genre d’exhibition en public peut vous valoir de vous retrouver devant la justice.
Elle sourit, mais aligna les arguments de manière imparable.
— Le problème, c’est qu’il était cinq heures du matin, et même au petit jour, les lieux étaient totalement déserts. Je doute qu’en dehors du VPCiste vous trouviez beaucoup de témoins. Vous me direz sans doute que c’est suffisant. Je vous répondrai que mon client est quelqu’un de vraiment important, et si vous cherchez à en savoir plus, je crains que vous ne vous heurtiez à un mur. Vous savez, le pouvoir a ses limites, et vous ne jouez pas dans la cours des grands.
Curieusement, le discours qu’elle tenait ne heurtait pas le flic. Il avait déjà entendu les pires arguments, et elle avait certainement raison. Mais un souvenir remontait en lui, celui d’une copine de son temps de jeunesse, une belle brune opulente comme elle, avec une poitrine lourde, avec qui il avait entretenu quand il avait un peu plus de vingt ans, une relation étrange. Mais c’était souvent le cas dans les relations humaines, car chacun se crispait sur ses a priori, ses inhibitions, ses goûts. Elle était venue vers lui mais elle lui avait expliqué que sa hantise était de tomber enceinte, et qu’elle ne souhaitait pas qu’il la pénètre. Elle était convaincue que les méthodes contraceptives, quelles qu’elles soient, n’étaient jamais cent pour cent efficaces, ce en quoi elle n’avait pas tort. Ils multipliaient donc des jeux qui n’étaient pas pour lui déplaire, d’autant qu’il ne les avait pas pratiqués auparavant avec d’autres filles. Elle aimait le prendre entre ses seins, caresser sa queue, la malaxer, jusqu’à ce qu’il jouisse, lui arrosant l’épiderme de semence, ou avalant le gland qu’elle faisait dépasser dans son décolleté. Et il se disait qu’il aurait bien volontiers fait la même chose avec la jolie blonde.
Le pire était d’ailleurs de se dire qu’elle lisait dans ses pensées et qu’elle savait exactement ce qu’il souhaitait à cet instant. Il aurait aimé voir plus d’elle. Mais il imaginait mal formuler cette requête.
— Vous pouvez me dire ce que vous faites dans la vie ?
— Je suis étudiante. Je finis un doctorat en ethnologie. Et je profite de mes heures perdues pour faire du bien aux autres.
— Un site Internet ?
— Le bouche-à-oreille. Vous voulez savoir comment tout a commencé ? Un ami de mon père. Il y a un an, je rentrais d’une soirée étudiante, très tôt le matin, à peu près à la même heure qu’aujourd’hui, en traversant ces mêmes bois. J’habite juste à côté. J’ai aperçu un homme à quatre pattes, par terre en costume, dans un bosquet. Je me suis approchée silencieusement. Il était entouré de trois filles en robe de soirée qui lui urinaient dessus. Elles se sont éloignées. Je ne sais pas ce qui m’est passé par la tête. J’avais la vessie pleine. Je me suis approchée, et je me suis vidée sur lui, longtemps. Il frottait son sexe. Il s’est fait jouir. Je pensais qu’il ne m’avait pas reconnue, mais il est venu me trouver quelques jours plus tard, en me demandant si on pouvait recommencer. Contre de l’argent. Ça a été le début. Après, avec le bouche-à-oreille, j’ai été demandée. Disons que je satisfais des rêves peu classiques, et que cela me permet de me payer mes études, mais aussi de mettre de l’argent de côté.
Elle se tut un instant. Il y avait dans le bureau une atmosphère de tension érotique.
— Vous savez je suis capable de lire dans l’esprit d’un homme et de savoir ce qu’il veut.
Il regretta de l’avoir dit une fois la phrase prononcée, mais ce fut trop tard.
— Alors dites-moi ce dont je rêve en vous regardant ?
— Déjà, de continuer à contempler ma poitrine.
Elle tira sur le zip en mettant ses seins de nouveau à nu.
— Que je me lève et que vous puissiez admirer mes courbes.
Elle se leva et se déplaça dans la pièce, tournant sur elle-même, exposant ce corps qui lui faisait envie.
— La raison pour laquelle tant d’hommes viennent vers moi, c’est tout simplement que non seulement je leur donne ce qu’ils veulent, mais j’anticipe ce qu’ils veulent, avant même qu’ils n’y aient pensé.
Elle contourna le bureau et vint s’appuyer contre celui-ci.
— Vous êtes comme les autres, je sais ce dont vous avez envie.
Elle se bascula en arrière, tirant sur la fermeture-éclair, basculant pour l’ouvrir de telle sorte qu’elle offrit à sa vue son pubis glabre, son sexe et son anus. Restant sur le dos, dans une position en semi-déséquilibre, elle le laissa profiter de la vue.
— N’ai-je pas raison ? N’est-ce pas exactement le spectacle que vous désiriez que je vous offre ?
Sans fausse honte à présent, il prit le temps d’examiner le sexe offert. Le lycra collant disait le gonflement de la vulve, et la fente au milieu. Ce qu’il ne disait pas, c’était ce gros paquet de lèvres qui sortait d’elle et s’étirait, gonflant et s’allongeant sous ses yeux. Elles étaient bistres, plus sombres que le reste du ventre, et elles se gorgeaient de sang, témoin de l’excitation que lui procurait la situation. Ce fut d’ailleurs certainement pour la même raison que son clitoris émergea des chairs qui l’encapuchonnaient, d’une manière quasi comique.
Elle vint glisser deux doigts entre les lèvres émergentes, les attrapa et les replia sur le côté, laissant voir leur face interne, aussi rose et claire que l’extérieur en était sombre. Elle lui laissa le temps de bien les admirer. Il avait nettement conscience que c’était elle qui avait le dessus sur lui, qu’il avait perdu la partie, mais il n’avait plus à ce moment précis qu’une envie, profiter de ce qu’elle lui offrait, en étant conscient qu’une fois qu’elle aurait passé la porte de ce bureau, parce qu’il la laisserait partir, il ne verrait sans doute plus jamais une femme lui offrir ce spectacle unique.
Ce ne fut d’ailleurs que le début. Elle planta en elle ces deux mêmes doigts et s’ouvrit, lui laissant voir une muqueuse intérieure rose, habitée par des reliefs et des creux. Elle lui laissa le temps de bien regarder avant de se relâcher.
Elle se pencha en avant et posa sa main sur la bosse, bien visible qui distendait son pantalon.
— Je crois bien que je ne peux pas partir sans vous soulager.
Il la laissa faire, tandis qu’elle le mettait à nu, dégageant un sexe dont il aurait sans mal convenu qu’il était aussi gorgé de sang que les lèvres qui se trouvaient sous ses yeux, à la fois de désir et de frustration. Elle se mit à le caresser avec une extrême lenteur qui lui plut énormément. Il n’avait qu’un regret, sa peur d’exploser trop vite.
Il comprenait sans mal pourquoi elle avait tant de clients. C’était sans doute la première fois qu’on le caressait aussi efficacement. Elle l’amenait au bord de la jouissance, puis relâchait la pression, avant de redémarrer.
Quand il finit par jouir, il se retint pour ne pas crier. Il eut le sentiment qu’il n’avait jamais joui aussi fort. Une grande partie de sa semence atterrit sur le latex, le souillant.
Il ferma les yeux un instant. Quand il les rouvrit, elle avait disparu.
Il l’aurait de toute façon laissée partir.
Il se rendit compte qu’elle avait griffonné sur une feuille un numéro de portable.
Il sut qu’il l’appellerait, certainement très bientôt.